Transcription de balado : Dans les coulisses d'une audition à l'émission Dragons' Den
Si vous avez regardé la populaire émission télévisée Inside The Dragons’ Den, vous savez qu'il s'agit d'un groupe de gens d'affaires importants qui cherchent à investir dans des entreprises canadiennes prometteuses.
Mais convaincre quelqu'un de vous avancer des fonds n'est jamais chose facile, surtout avec les « dragons ». Avec eux, on ne rigole pas.
Aujourd'hui, nous accompagnerons des représentants de Green Over Grey dans leur démarche pour obtenir le financement des dragons. Ils ont fait leur présentation aux producteurs de la série The Dragons’ Den, qui tenaient des auditions à un salon commercial de l'industrie environnementale à Vancouver.
Restez avec nous pour écouter leur présentation et voir s'ils ont réussi à passer la rampe. La conclusion pourrait vous surprendre.
Bonjour. Je m'appelle Michael Mancini, rédacteur en chef de CanadExport, le cybermagazine officiel du Service des délégués commerciaux du Canada – le réseau le plus complet de professionnels du commerce international au Canada.
Avant d'aller à l'audition de l'entreprise, j'ai parlé avec Molly Duignan, une productrice de Dragons’ Den. Vous l'entendrez plus tard « cuisiner » les porte-parole de l'entreprise. Elle nous raconte ici ce que recherchent les producteurs et les Dragons.
Molly Duignan : Ce que nous voulons, c'est vraiment... il n'y a pas de règle précise, toute faite. Nous cherchons les meilleurs, les plus brillants. Nous cherchons des idées novatrices uniques, que ce soit pour démarrer une entreprise ou pour faire gonfler le chiffre d'affaires d'une entreprise déjà implantée. Vous savez, les Dragons veulent investir dans l'idée dont tout le monde parlera demain. Alors, on ne sait jamais ce qui nous sera proposé.
Michael Mancini : Alors, quelles sont les erreurs que les entreprises font souvent?
Molly Duignan : Je pense que le point le plus important qu'on doit constamment rappeler aux candidats, et ce n'est pas pour paraître arrogants, mais c'est qu’il s’agit d’une émission de télévision. Oui, c'est un spectacle où on parle affaires, mais le défaut le plus commun chez les participants, c'est dans la façon de faire leur présentation. Je répète sans cesse aux gens que le public visé a entre 8 et 88 ans. Comment présenter votre idée pour qu'un enfant de huit ans la comprenne? Comment la présenter pour que votre grand mère au fin fond de l'Alberta sache de quoi il s'agit? Il arrive que les Dragons demandent des détails particuliers, mais le public en général doit pouvoir saisir le fondement de votre idée, pourquoi elle est géniale et pourquoi on devrait la choisir. C'est aussi simple que cela.
Michael Mancini : Alors, quels sont vos critères financiers? Avez vous des conseils sur les choses que les entreprises doivent éviter à tout prix?
Molly Duignan : En gros, on applique une formule générale. Le montant demandé doit être justifié par rapport à la valeur de l'entreprise. Ainsi, des candidats affirment que leur entreprise vaut un million de dollars, d'accord? On nous dit : « J'ai besoin de 100 000 $ contre 10 % des parts de mon entreprise. » On leur demande : « Alors votre entreprise vaut un million? »; ils répondent « Pas encore, mais ça viendra. » Vous savez, on investit dans un potentiel, mais franchement, et même si c'est un argument valable, il ne s'agit pas seulement de potentiel. Que vaut l'entreprise actuellement? C'est ce que les Dragons veulent savoir. Quelle est sa valeur réelle, là, maintenant? Et demain, votre entreprise aura-t-elle la même valeur; dans quoi est ce qu'on peut investir?
Alors, mon travail c'est de les acculer au pied du mur. Comme on dit toujours, si vous trouvez que je suis sans pitié, attendez d'être en face des Dragons. Je leur pose toutes les questions que les Dragons vont certainement leur poser. C'est une répétition, une audition, vous savez, alors je leur dis si vous ne pouvez pas répondre à mes questions, comment allez vous faire pour affronter les Dragons? Parce qu'on entend souvent des réponses comme « Je ne sais pas; je n'y avais pas pensé » ou bien « On n'est pas rendu à ce stade encore ». Peut être que vous n'êtes pas prêts, tout simplement.
Michael Mancini : C'était Molly Duignan, productrice de l'émission The Dragons’ Den. Eh bien! on dirait que l’étape de sélection n'est pas gagnée d'avance. Mais passons maintenant à nos candidats, les deux directeurs de Green Over Grey, qui ont fait leur présentation à Mme Duignan et à un autre producteur.
Michael Weinmaster: Bonjour. Je m'appelle Mike Weinmaster et voici mon collègue, Patrick Poiraud. Et notre entreprise, c'est Green Over Grey, Living Walls and Design.
Patrick Poiraud : Essentiellement, ce que nous créons, ce sont des jardins grimpants, et nous pouvons habiller de verdure tout un pan de mur d'un édifice, à l'intérieur comme à l'extérieur. Nous prenons en charge l’ensemble du projet, que ce soit pour un pied carré ou jusqu'à 27 pieds carrés.
Nous aimerions que les Dragons investissent dans notre produit afin d'en mousser la promotion et de faire connaître notre concept...
Molly Duignan : Combien voulez vous?
Patrick Poiraud: 250 000 $.
Molly Duignan : Pour combien de parts?
Patrick Poiraud : Pour 10 % de nos actions.
Molly Duignan : Alors, votre entreprise vaut 2 millions, 2 millions et demi de dollars?
Patrick Poiraud : Pas encore, mais notre potentiel est immense.
Molly Duignan : Combien cela coûte pour produire ... et combien d'argent faites vous?
Patrick Poiraud: Eh bien, cela fait environ 100 à 130 $ le pied carré.
Molly Duignan : Pour le client?
Patrick Poiraud: Pour le client, oui. Ça inclut les plans et la conception, la consultation et l'installation.
Molly Duignan : Et quelles sont vos limites, je veux dire, question territoire? D'abord, où se trouve votre siège? Ici à Vancouver?
Patrick Poiraud: Notre bureau est à Vancouver.
Molly Duignan : Et qui sont vos clients? Donnez moi des exemples de vos clients et jusqu'où vous pouvez aller.
Patrick Poiraud: Bien, nous avons fait un certain nombre de projets résidentiels. Aussi, nous venons de terminer un projet à la Banque ING Direct, à l'angle de Howe et West Pender. La Banque voulait se donner une image plus verte, alors nous avons fait deux jardins aériens à cet endroit.
Molly Duignan : Donnez-moi un exemple de la taille de ce mur, et combien ING Direct vous a payé pour ça?
Patrick Poiraud: Le premier mur était d'une centaine de pieds carrés, l'autre de 80 pieds carrés environ. Nous avons eu 15 000 $ pour les deux.
Molly Duignan : D'accord. Y a-t-il des possibilités d'expansion, sinon, est ce que l'investissement des Dragons se limiterait à une petite entreprise locale? Qu'est ce que vous imaginez pour l'avenir...?
Patrick Poiraud: Nous voulons dominer le marché mondial, rien de moins.
Molly Duignan : Ah oui, vraiment? D’accord.
Patrick Poiraud: Non, je veux dire… Tout d'abord, nous voulons desservir le marché canadien, ensuite les États Unis, et après, l'international. Nous avons eu beaucoup de demandes de partout dans le monde, vous savez.
Molly Duignan : Et ces murs peuvent résister à la neige et aux grands froids des Prairies? Je ne veux pas vexer les gens des Prairies, mais même là où je vis, à Toronto, où c'est sombre et tristounet la plupart du temps, est ce qu'un mur vivant survivrait?
Patrick Poiraud: Absolument. Ce qui est fantastique avec notre système, c'est qu'on peut intégrer des milliers de plantes différentes; alors quand nous nous trouvons dans un climat vraiment froid, nous utilisons des plantes de zone 3 ou 4, qui peuvent résister aux hivers rigoureux.
Molly Duignan : Comment décririez vous le travail que vous faites pour gagner votre vie?
Patrick Poiraud : Eh bien, nous sommes des consultants en design végétal, des créateurs d'art vivant. Nos œuvres font partie de l'art public. Notre rôle, c'est d'apprivoiser la nature en ville.
Molly Duignan : Bon, alors donnez moi une idée de vos bénéfices.
Patrick Poiraud : Bien sûr; nous faisons entre 30 et 40 % de profit.
Molly Duignan : Bien. Et depuis combien de temps êtes-vous en affaires?
Patrick Poiraud: Notre entreprise est constituée en société depuis 2008, mais il a fallu des années de recherche pour mettre ce système au point. Nous avons voyagé partout dans le monde, dans des forêts tropicales comme en Malaisie, en Papouasie-Nouvelle-Guinée et au Brésil, et nous avons étudié des plantes qui poussent naturellement à la verticale, sans terreau, comme des épiphytes et des hémi-épiphytes.
Molly Duignan : Bon, alors voici ce qui me plaît dans votre présentation. C'est différent. Je pense que c'est quelque chose de nouveau et accrocheur, comme vous dites. Mais ce qui m'inquiète, c'est comment vous allez pouvoir présenter cette idée pour que les gens comprennent bien ce dont vous parlez. Pensez vous que le propriétaire d'une maison serait intéressé à l'acheter, ou est ce destiné uniquement aux grandes entreprises comme ING?
Patrick Poiraud : Nous avons une demande du marché résidentiel aussi. Au salon commercial, des gens de partout dans le monde qui ont vu notre produit ont dit qu'ils aimeraient intégrer ce concept à leur résidence.
Molly Duignan : Alors vous pourriez commercialiser ce système pour des gens comme vous et moi aussi bien que pour des sociétés.
Patrick Poiraud : Oui, absolument.
Molly Duignan : D'accord. Bien. Très bien. C'était vraiment une belle présentation.
Michael Mancini : Eh bien, ils ont semblé aimer le concept. Nous voici aujourd'hui quelques semaines plus tard. Demandons maintenant à Patrick Poiraud de Green Over Grey, que vous venez tout juste d'entendre, si son entreprise a été sélectionnée pour l'émission.
Bonjour Patrick. Ici Michael Mancini de CanadExport. Alors les producteurs ont semblé impressionnés par votre présentation. Avez-vous été choisis pour l'émission?
Patrick Poiraud : Oui, nous avons été acceptés comme participants à l'émission, et les producteurs nous ont appelés à quelques reprises, mais nous avons décidé de ne pas y participer cette année. Nous avions deux bonnes raisons de décliner l'offre.
Ça peut paraître surprenant, mais tout d'abord, ce qui nous a incités à reporter notre participation, c'est que nous en sommes encore aux premiers stades de l'entreprise et nous ne voulions pas céder maintenant des parts à un investisseur; en outre, nous n'avons pas vraiment besoin de financement à ce stade. C'était ça la raison principale. L'autre raison, c'est que malgré le fait qu'il s'agit d'une émission de télévision diffusée sur une chaîne nationale avec de grosses cotes d'écoute, ce qui aurait été un tremplin intéressant, nous avons compris que ce n'était pas un médium vraiment compatible avec le message que nous voulons communiquer. On ne voulait pas mettre autant l'accent sur l'aspect financier… le côté terre à terre de notre entreprise.
L'émission est vraiment axée sur le côté spectaculaire et l'intensité des interactions entre les investisseurs potentiels et les entrepreneurs. Au départ, on fait une brève présentation du produit, mais ensuite, le produit est complètement mis de côté. On s'attarde presque uniquement sur la question des finances, et sur la façon dont les investisseurs vont pouvoir faire de l'argent avec notre produit. Ce n'est pas cela que nous voulions vraiment communiquer. Nous avons une approche artistique de notre travail, et c'est de cela que nous voulons parler. Si nous participons à des émissions de télévision, ce sera pour expliquer notre approche de création des jardins aériens.
Michael Mancini : Eh bien, c'est vraiment intéressant. Alors pourquoi ne voulez-vous pas céder de parts de votre entreprise pour l'instant?
Patrick Poiraud : En premier lieu, nous n'avons pas vraiment besoin de fonds additionnels à ce stade ci. Ça viendra peut être plus tard. Donc, le fait d'avoir un investisseur qui deviendrait actionnaire majoritaire et détiendrait la part du lion à ce stade de l'entreprise nous donnait le sentiment que ce n'était pas la bonne décision à prendre et qu'on devait plutôt prendre de l'expansion avant de parler à des investisseurs potentiels. Pour le moment, nous ne sommes pas prêts à prendre contact avec des investisseurs avant d'avoir exploité tout le potentiel de notre entreprise.
Michael Mancini : Alors avec le succès de cette présentation, quand avez-vous pris conscience qu'il fallait prendre du recul, et constaté que ce n'était pas la bonne chose à faire maintenant?
Patrick Poiraud : Ce fut une décision relativement difficile à prendre, et nous avons consulté différents entrepreneurs, nos familles, nos amis, et nous en avons parlé entre nous deux aussi, évidemment. Il a fallu quelques jours pour en venir à cette décision, une décision qui n'était pas facile à prendre, mais nous pensons que nous avons pris la bonne.
Michael Mancini : Dites moi, qu'avez vous appris de toute cette expérience?
Patrick Poiraud : Eh bien, ce fut une expérience des plus enrichissantes, vous savez, de présenter notre concept et notre entreprise, et de réussir à susciter l’intérêt d’investisseurs potentiels. Alors c'est une expérience positive, qui nous a appris beaucoup. Ensuite, notre spontanéité nous a servi. Nous ne savions pas que Dragons Den serait présenté à des salons commerciaux, donc nous avons fait notre présentation spontanément, sans trop de préparation. Voilà l'une des premières leçons que nous en tirons, c'est de mieux préparer notre présentation; cela dit, tout s’est très bien déroulé. Comme je l'ai dit, les producteurs nous ont invités à participer à l'émission. Mais il faut se préparer minutieusement avant de rencontrer des investisseurs.
Michael Mancini : Bien, nous vous souhaitons tout le succès voulu dans vos projets. Je vous remercie de nous avoir accordé du temps aujourd'hui.
Patrick Poiraud : De rien, Michael. Merci à vous.
Michael Mancini : Eh bien, c'est tout pour cette édition de baladodiffusion de CanadExport. Soyez des nôtres pour notre prochaine diffusion, alors que nous vous présenterons une autre audition d'entrepreneurs canadiens pour l'émission Dragons' Den.
Les entreprises canadiennes qui veulent des conseils sur la manière de préparer une présentation, qu'elles soient à la recherche de capital de risque ou d'investissement providentiel, n'ont qu'à consulter le site canadexport.gc.ca. On y trouve des vidéos, des articles et d'autres présentations audios sur de multiples sujets connexes.
Pour savoir en quoi le Service des délégués commerciaux du Canada peut vous être utile, visitez le www.deleguescommerciaux.gc.ca.
Ici Michael Mancini qui vous dit à bientôt.
Pour télécharger d’autres balados, allez à www.canadexport.gc.ca ou sur iTunes en utilisant le mot-clé « CanadExport ».
Abonnement au : cybermagazine et fil RSS