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Service des délégués commerciaux du Canada

Les immigrants sont essentiels à la réussite des exportations

D’après une nouvelle étude, les entreprises mises sur pied par des immigrants arrivés récemment au Canada ont le potentiel d’élargir les exportations canadiennes vers les marchés émergents.

Étant donné leur maîtrise et leur parfaite connaissance de diverses langues et cultures, ainsi que leurs nombreux liens d’affaires à l’étranger, les entrepreneurs immigrants n’hésitent pas à percer des marchés non traditionnels, ignorant les marchés en stagnation aux États-Unis et au Canada, révèle l’étude.

Toutefois, les entreprises détenues par des immigrants qui connaissaient le plus de succès sur les marchés émergents étaient généralement de petite envergure, et n’avaient pas les ressources en matière d’innovation et de connaissances pour leur permettre d’avoir une croissance importante, lit-on dans l’étude. Par ailleurs, les entreprises novatrices ne sont pas nécessairement en mesure de prospérer, car elles n’ont pas accès au financement dont elles ont besoin, et il n’existe pas de politiques publiques pour les soutenir.

Produite à l’intention du Conference Board du Canada et publiée dans un rapport intitulé Selling Beyond the U.S.: Do Recent Immigrants Advance Canada’s Export Agenda?, l’étude laisse entendre que davantage de soutien doit être apporté aux entreprises novatrices appartenant à des immigrants qui exportent leurs produits à destination de marchés à forte croissance.

« La diversité de notre population d’immigrants contribue largement à la réussite du Canada au chapitre des exportations », explique Sui Sui, coauteure de l’étude. « Si nous leur en offrons les moyens, les immigrants peuvent devenir un atout stratégique de taille pour le pays. »

Mme Sui et son collègue et coauteur de l’étude, Horatio Morgan, tous deux professeurs assistants au Département des études en gestion internationale de l’École de gestion Ted Rogers, à Université Ryerson de Toronto, ont analysé plus de 15 000 petites et moyennes entreprises pour les besoins de leur étude. Ils se sont concentrés sur les PME appartenant à des entrepreneurs ayant immigré au Canada depuis moins de cinq ans.

Ils ont pu constater que ces propriétaires d’entreprises à l’échelle du Canada sont 1,6 fois plus susceptibles de cibler des marchés autres que les États-Unis, comparativement aux propriétaires d’entreprises de non-immigrants. Qui plus est, les entreprises détenues par de nouveaux immigrants qui exportent vers des marchés autres que les États-Unis figurent parmi les PME les plus florissantes. En effet, de 2007 à 2011, les profits de ces entreprises ont progressé en moyenne de 21 p. 100 par année, alors que ceux d’entreprises appartenant à des non-immigrants ont reculé de 2 p. 100.

Le rapport souligne que l’un des principaux objectifs du gouvernement du Canada est d’accroître les exportations canadiennes vers les marchés émergents. Comme les nouveaux immigrants possèdent des avantages en matière de maîtrise de langues étrangères, de connaissance d’autres cultures et d’accès à des réseaux dans leurs pays d’origine, ils sont mieux placés pour exporter vers des marchés autres que les États-Unis. Toutefois, si les produits et services qu’ils proposent sont concurrentiels en termes de prix, ils le sont moins en termes de nouveauté et d’innovation, ce qui les rend moins viables à long terme.

Mme Sui est venue étudier au Canada en 2001, en provenance de la Chine où elle avait travaillé dans une entreprise d’import-export. Elle fait remarquer que 3 p. 100 des PME canadiennes appartiennent à de nouveaux immigrants — soit près de 30 000 entreprises. Bon nombre de ces immigrants arrivent au Canada avec une expérience en tant que cadres supérieurs ou qu’entrepreneurs dans leur pays d’origine. Une fois au Canada, ils travaillent avec divers produits et diverses ressources, explique-t-elle, mais ils ont les connaissances et la mentalité de bons exportateurs.

« Ils possèdent toujours les compétences qu’ils ont acquises dans leur ancien pays, ainsi que les réseaux et les contacts établis là-bas », ajoute-t-elle. Ces compétences et relations peuvent « les aider à démarrer », mais elle note qu’ils proposent principalement des produits à faible marge bénéficiaire dans la vente en gros et au détail, qu’ils n’exploitent pas de créneau et qu’ils sont moins efficaces sur le plan opérationnel.

Entretemps, les entreprises canadiennes présentent un degré élevé d’échec sur les marchés émergents, indique Mme Sui, en particulier lors de la première année. L’un des facteurs de cette situation est que ces entreprises ne comprennent pas la culture des affaires de pays comme la Chine et l’Inde. Cela peut inclure une « conception différente du temps », précise-t-elle, ce qui veut dire que les rendez-vous sont souvent modifiés ou annulés, et que les transactions peuvent exiger un certain temps. « Toutes les transactions sont conclues pendant les repas, et si vous ne vous conformez pas à cette façon de faire, vous aurez de la difficulté à établir une relation de confiance. »

Vendre ailleurs qu’aux États-Unis

Selon le Conference Board, les entreprises d’immigrants qui exportent vers des marchés autres que les États-Unis :

Source : Selling Beyond the U.S.: Do Recent Immigrants Advance Canada’s Export Agenda?

Quant aux nouveaux immigrants, ils connaissent bien ces coutumes; ils travaillent d’ailleurs pour des PME prospères, ou bien ils en sont propriétaires, fait ressortir Mme Sui. Préoccupées par les barrières linguistiques et culturelles en milieu de travail, les petites entreprises hésitent souvent à embaucher des travailleurs immigrants; pourtant, les employés de diverses origines culturelles peuvent aider les entreprises à développer des marchés et à négocier avec des fournisseurs et des consommateurs dans les pays émergents, précise-t-elle. « Il s’agit d’un atout de taille. »

Nytric Ltd., de Mississauga, en Ontario, une entreprise de technologie qui aide ses clients à concevoir des produits tels que des appareils électroniques grand public et des instruments médicaux, a bien appris cette leçon. Comme ses activités à l’extérieur du Canada sont à l’origine de 90 p. 100 de son chiffre d’affaires, l’entreprise compte environ 10 nationalités parmi son effectif de 22 employés, en plus de suivre une « philosophie de base » ouverte à la diversité, note M. Anthony Gussin, directeur du développement des affaires de Nytric.

Lui-même un immigrant venu du Royaume-Uni, M. Gussin explique que le fondateur et PDG de l’entreprise, M. Av Utukuri, originaire de l’Inde, a su bâtir de façon stratégique une équipe d’ingénieurs et de directeurs qui sont bien enracinés dans la communauté internationale, et qui sont en mesure de mettre à profit leurs expériences pour percer de nouveaux marchés.

Lorsqu’un immigrant postule pour un emploi, la plupart des entreprises veulent généralement connaître le type d’expérience qu’il possède au Canada, et depuis combien de temps il y est installé. Pour Nytric, l’expérience des employés dans différentes régions du monde est considérée, affirme M. Gussin, notamment parce qu’elle les rend plus ingénieux lorsqu’il est question de résoudre des problèmes.

L’ambiance dans un milieu de travail où se côtoient différentes cultures se caractérise par la collaboration et l’ouverture d’esprit, ajoute-t-il, sans compter que celles-ci apportent également des avantages pratiques. « La capacité de parler à un client à l’étranger dans sa propre langue représente une valeur inestimable. »

L’étude du Conference Board révèle aussi les faits suivants. Les entreprises appartenant à des immigrants qui exportent vers des marchés autres que les États-Unis sont surtout concentrées en Ontario et au Québec. Une part importante de ces entreprises, c’est-à-dire plus du tiers, appartient à des femmes. Les entreprises les plus novatrices appartenant à des immigrants exportent vers les États-Unis et investissent quatre fois plus dans la recherche et développement (R-D) que celles qui exportent vers des marchés autres.

L’accès au financement constitue un obstacle de taille pour les entreprises exportatrices détenues par des immigrants, et cela est d’autant plus marqué parmi celles détenant « peu de biens matériels », fait savoir Mme Sui. Il s’ensuit que les entreprises novatrices axées sur la R-D doivent se tourner vers des investisseurs providentiels ou des investisseurs en capital-risque.

Radha Radhakrishnan, président de RK Global Consultants Inc., un petit cabinet d’experts-conseils de Toronto qui fournit des services en gestion et en finances à des entreprises faisant des affaires à l’étranger, soutient que les entrepreneurs immigrants ont de nombreux atouts, notamment leur éducation, leur expérience, leurs contacts et l’argent qu’ils apportent au Canada. Ces immigrants trouvent néanmoins difficile de « naviguer dans les milieux d’affaires canadiens », et ils continuent à se heurter à notre système bancaire.

Originaire du Sri Lanka, M. Radhakrishnan a travaillé dans des banques au Sri Lanka, au Pakistan, en Allemagne et au Canada, et il possède plus de 35 années d’expérience dans le secteur bancaire et la finance. Selon lui, les banques canadiennes ne prêteront à une entreprise qu’en garantie de « biens qu’elle a déjà inscrits dans son bilan » ou de biens immobiliers.

Les entreprises en démarrage appartenant à des immigrants n’ont souvent pas ce genre de biens inscrits dans leur bilan. Elles cherchent plutôt à obtenir du « financement de transactions commerciales », soit des mécanismes de prêt qui leur permettront d’acheter des matières premières afin de fabriquer leurs produits et de les commercialiser par la suite. Ces mécanismes peuvent prendre la forme de lettres de crédit ou de bons de commande émis par un acheteur.

« Ils ont besoin d’argent pour conclure de nouvelles affaires, plutôt que pour celles déjà conclues », relève M. Radhakrishnan, ajoutant que le gouvernement devrait jouer un rôle de chef de file pour ce qui est d’encourager les banques à autoriser ces formes de prêts non traditionnels. « Si l’on disposait des mécanismes de financement appropriés, il serait possible de quadrupler le volume d’exportations canadiennes de nos immigrants. »

Mme Sui mentionne que l’étude du Conference Board pourrait influencer les décideurs à élaborer des politiques pour trouver des moyens de mettre à profit les connaissances des immigrants entrepreneurs et aider leurs entreprises à être plus novatrices sur la scène mondiale.

Par exemple, des programmes favorisant l’échange de connaissances et d’expériences entre les entrepreneurs immigrants et non immigrants pourraient s’avérer utiles, tout comme un soutien gouvernemental aux initiatives de R-D menées par des entreprises détenues par des immigrants qui ciblent des marchés émergents.

Mme Sui prévoit étudier des données plus récentes sur l’ensemble des immigrants au Canada propriétaires d’entreprise afin de déterminer si ces dernières sont plus performantes au chapitre de l’exportation. Elle se penchera également sur leur langue maternelle afin de déceler si les immigrants polyglottes bénéficient d’un « effet intrinsèque ».

Pour de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec le Service des délégués commerciaux du Canada.

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